Zaia Vilain
Nombre de messages : 97 Date d'inscription : 10/10/2004
| Sujet: Bloody Sunday Mer 8 Nov à 23:24 | |
| - Citation :
- Mary;
Les convenances souhaiteraient que je me présente avant de continuer mais connaissant l’environnement dans lequel tu as grandi, je sais que tu ne m’en tiendras pas rigueur. De plus, en vue de la société actuelle, nous savons toutes les deux que celles-ci accusent bien des failles. Par ailleurs, je te demande juste de poser quelques instants tes yeux sur la vie d’une femme qui t’es inconnue. Certes, rien ne t’y oblige mais j’espère faire de la curiosité, mon seul et unique argument, mon alliée.
Pendant longtemps, comme beaucoup d’Irlandais, je croyais en Dieu. Il devait me guider tout au long de ma vie. La religion offrait une ligne de conduite altruiste qui inculquait des valeurs humaines telles que le pardon. Mais l’application était toute autre et loin d’être gratuite. N’est ce pas étrange de se voir accusée d’une faute qu’on n’a pas commise, d’un fait que nous n’avons pu contrôler ?! Pourtant, je me suis retrouvée dans cette situation, complètement désarmée. A l’époque, la naïveté était encore maitresse de ma personne. J’ai obéis. Je pense que de toute manière je n’en avais pas le choix. Ma nouvelle vie m’était imposée. Je me suis retrouvée debout, devant mon lit avec comme cadeaux de bienvenue un chapelet et une bible. Ce sera mon unique livre de chevet, les seules pages que je pourrai balayer des yeux. Aucune fenêtre n’ornait les murs livides. Le contact avec l’extérieur m’allait être interdit. La seule source de lumière qui m’était offerte filtrait sous la porte close. L’atmosphère était aussi terne et triste que le linge de maison. Au dessus de l’entrée, une icône, la vierge Marie, qui à chaque entrebâillement de porte, semblait poser sur moi un jugement. Cinq lits, tous faits de la même façon, alignés au centimètre près, figuraient dans cette pièce étroite, étouffante. Seul le grincement du bois sous nos pas meublait timidement un silence trop lourd pour être rassurant. Une cellule de prison aurait semblé plus chaleureuse. L’air y était assommant comme les fautes qu’on nous imputait. Ici, tout était dénué de personnalité. J’allais devoir m’en accommoder. J’avais déjà entendu parler de ces endroits, mais jamais je ne pensais y être à ce point confrontée. Mon quotidien allait se résumer à bien peu de choses : travailler et expier une faute que j’avais du mal à considérer. Un travail harassant et une rythmique exténuante régissaient nos journées. Je me levais très tôt, trop tôt. Tous les jours c’était la même chose, le même labeur. Je pouvais reconnaître tout type de vêtements. Un jour, j’avais entre les mains du linge d’hôpital et l’autre, des uniformes scolaires. C’était la seule variante dans mon travail. Mes larmes se mêlaient à cette eau savonneuse. Les gens allaient porter mes pleurs, ma tristesse, ma souffrance sans même le savoir. Assez vite, je compris qu’il me fallait d’abord passer par un enfer terrestre quotidien pour avoir droit à ce fameux paradis. Le curé avait sa propre notion du nirvana. Il était là, au dessus de moi, assis sur moi. Je me débâtais mais il avait plus de force que moi. Je criais, je hurlais mais personne ne pouvait m’entendre, personne ne voulait m’entendre. Il posait ses yeux sur moi et son regard me brulait. Je fermais les miens pour ne pas subir tout ça mais rien ne changeait. Je sentais sa main sur ma poitrine, il me la pressait comme un affamé se jette sur de la nourriture. Il me faisait mal. J’essayais de contrôler cette douleur mais n’y parvenais pas. Je le fixais dans les yeux, implorant sa pitié. Il continuait, ça l’excitait davantage. Ses doigts salissaient ma chair et laissaient derrière eux le parfum de la répugnance. Comme si ce n’était pas suffisant, il s’immisçait dans mon intimité. Je contractais mes muscles autant que je pouvais mais son ignominie avait raison de moi. Des lames de rasoir venaient déchirer mon âme. Il se mordait la lèvre inférieure pour retenir tout râle trop expressif. Il bougeait son corps sur le mien, suant comme un animal. Il devenait de plus en plus violent. Et dès lors que mon être n’est plus que lambeaux, il se retirait et laissait son venin acide me ronger le ventre. J’étais devenue un objet sexuel. Au fil de ces expériences, j’en venais à avoir des idées morbides. A quoi bon subir tant de douleur si l’existence de ce paradis se métamorphose en illusion? Je commençais d’abord à penser qu’il était, en fait, mes rêves. Chaque nuit, je m’endormais et m’arrachais de mon corps. Je le laissais derrière moi tel un fardeau et courrais aussi vite que possible pour qu’il ne me rattrape pas. J’allais sans savoir vers où me diriger. Je voyais le bord d’une falaise arriver mais ne m’arrêtais pas. Je continuais instinctivement, encore, toujours plus. Je prenais mon élan pour mieux atterrir dans mes songes, phantasmes d’une vie. Mes rêves étaient la seule chose que je pouvais contrôler si on exclu le fait qu’ils étaient gérés par mon inconscient. Au moins, ce n’étaient pas elles. Elles, elles avaient le pouvoir d’y mettre un terme. Elles me réincarnaient de force dans mon enveloppe charnelle avec une acrimonie sans pareil. Elles se glorifiaient tous les jours de nous sauver. Nous sauver de quoi ? C’étaient elles nos bourreaux et, de surcroit, elles excellaient dans cet art tyrannique. Nous étions toutes ici pour retrouver un honneur perdu. J’en étais arrivée au point de ne plus parvenir à me considérer comme humaine. J’étais une chose. Chose insignifiante à les entendre dire. De ce fait, avais-je un honneur à retrouver ? Elles vociféraient, braillaient, invectivaient au moindre faux pas. A force, je ne les entendais plus et à mon tour, je m’injuriais à la moindre erreur comme elles nous l’avaient si bien professé. Nous aurions pu trouver une aide auprès de Dieu. Mais n’est ce pas lui qui nous avaient mises dans cette situation ? N’était ce pas en son nom qu’elles agissaient ? J’ai été une humaine jugée, ensuite un animal brimé pour terminer en chose sexuelle. Tout ça, sous ses yeux. Il est vite facile de se dire qu’Il n’en avait cure de ma petite personne. Ma déréliction grandissait à ne plus pouvoir la mesurer. J’ai été seule, ici, durant toutes ces années. Puis un jour, des gens, d’après mes souvenirs ça semblait être des policiers, sont venus nous chercher tels des héros. Nous étions libres, clamaient-ils fièrement. Libres… Ce mot aurait du m’emplir de joie mais la première pensée qui me vint à l’esprit fut la liberté de mettre un terme à ma vie. Au point où j’en étais, je me disais que Dieu me devait bien ça, même Marie-Madeleine n’eut pas à subir un tel acharnement sur son intégrité morale. Je me retournais une dernière fois avant de partir vers nulle part et vis mes tortionnaires se faire arrêter. Justice a été rendue affichaient les premières pages de journaux… N’est ce pas prétentieux ? Ma vie a été volée, bafouée, brisée. Il n’en reste que des débris sans importance.
Peut-être as-tu un jour désiré en savoir plus sur ta mère. A présent, tu connais sa vie et tu as des réponses à certaines de tes questions. Ne me juges pas comme eux l’ont fait, au final, mon seul crime, c’est celui d’avoir aimé.
Bien à toi, ma fille.
Elisabeth. Mary. Assise au fond de son canapé, elle dépose la lettre. Inspection de la pièce. Personne. Ses larmes s’extirpent malgré elle. Elle venait de retrouver sa mère. Une mère aimée, haïe et, pour finir, oubliée indument. Elle se lève, fouille dans un tiroir. Une feuille et un crayon, ce sera très bien. Un rendez-vous est pris. Mary. Dimanche brumeux. Sa mère. Comme prévu, elles marchent. Froide, elle l’emmène plus loin. Là où c’est calme et vide de regard. Dans ses bras sa mère, dans ses yeux tristesse et amour, dans sa poche son poignard aux couleurs de l’IRA. Dans une ruelle un cri étouffé. Dans les yeux de sa mère une douleur libératrice, sur ses mains du sang. - « Tu m’as donné la vie, je te rends la tienne. » O’Leary ? Mary O’Leary ? Disparue. | |
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Coffy Méta Gros Vilain
Nombre de messages : 2533 Localisation : J.L.V.d.M. Date d'inscription : 06/08/2004
| Sujet: Re: Bloody Sunday Jeu 9 Nov à 11:46 | |
| J'ai bien aimé.
Par contre, juste une remarque concernant la forme, la lettre meriterait d'avoir une mise en page un peu plus aérée (quelques saut de ligne et quelques paragraphes), le texte gagnerait ainsi en lisibilité. | |
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Borh Méta Gros Vilain
Nombre de messages : 861 Localisation : Val-de-Marne (mais je suis originaire des fôrets du sud de la Chine) Date d'inscription : 13/08/2004
| Sujet: Re: Bloody Sunday Jeu 9 Nov à 12:43 | |
| c'est vachement bien écrit je trouve. | |
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Malyss Endless
Nombre de messages : 1988 Localisation : J.L.V.d.M. Date d'inscription : 06/08/2004
| Sujet: Re: Bloody Sunday Jeu 9 Nov à 14:41 | |
| Chouette, un texte RP, et de très bonne qualité, en plus.
ça faisait longtemps.
*s'en va avant que La Clef lui fasse remarquer qu'il est censé écrire deux textes pour le SOS.* | |
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Gunny Gros Vilain
Nombre de messages : 302 Date d'inscription : 14/02/2008
| Sujet: Re: Bloody Sunday Jeu 14 Fév à 1:24 | |
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Coffy Méta Gros Vilain
Nombre de messages : 2533 Localisation : J.L.V.d.M. Date d'inscription : 06/08/2004
| Sujet: Re: Bloody Sunday Jeu 14 Fév à 1:37 | |
| OOOOOOH mais c'est Hunk hunk hunk !! | |
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Gunny Gros Vilain
Nombre de messages : 302 Date d'inscription : 14/02/2008
| Sujet: Re: Bloody Sunday Sam 16 Fév à 13:36 | |
| Punaise a poids rouge sans sel et fumé de tous les côtés, mais c'est que t'as varié en plus, rien que pour ça j'applaudis des deux pieds!!! | |
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bontakun Méta Gros Vilain
Nombre de messages : 2080 Age : 112 Localisation : Un camp de rabouins, un peu au nord d'ici. Date d'inscription : 20/10/2004
| Sujet: Re: Bloody Sunday Sam 16 Fév à 17:04 | |
| Une punaise ça n'a pas de pieds, tu bluffes. | |
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Gunny Gros Vilain
Nombre de messages : 302 Date d'inscription : 14/02/2008
| Sujet: Re: Bloody Sunday Dim 17 Fév à 1:00 | |
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